Quelle science est la non-philosophie ?

Tout philosophe rencontre un jour ou l'autre son « Sokal ». Que des scientifiques qui ne comprennent rien à l'acte philosophique et à sa nature transcendantale et à sa torsion des concepts accusent les philosophes de détournement de la science, rien que de tristement normal. Mais lorsque des philosophes connus pour s'être frottés parfois sérieusement aux sciences endossent à leur tour le diagnostic d'imposture contre d'autres, acquièrent-ils plus de poids pour cela ? ou bien au contraire leur vision philosophique de la rigueur scientifique ne devient-il pas une arme pour faire passer plus sûrement ce qui n'est qu'une philosophie parmi d'autres ? Il y a longtemps déjà que la prétention de la non-philosophie scandalise à vouloir se présenter comme une science de la philosophie. D'une part c'est un crime de lèse-souveraineté, argument secret, peu avoué, vraie raison du fait que les philosophes se disent « déroutés » par ses affirmations. D'autre part elle ne répondrait pas à ce qu'est une science, à ses exigences minimales, c'est l'argument publique ou de surface. Une philosophie étrange ou paradoxale, c'est simplement amusant. Mais une fausse science, c'est grave. L'objection vient à l'origine de Deleuze revêtant les habits d'un Sokal philosophe (pourquoi pas une non-science autant qu'une non-philosophie?) puis de Badiou et de son entourage (impossible de réunir les conditions d'une science à partir de l'Un, les axiomes de la non-philosophie sont de faux axiomes). Deleuze par sa pénétration des sciences, Badiou par une connaissance très approfondie ont su habiller une résistance qui vient de plus loin, même si en particulier dans le dernier cas, ils ont rendu assez vraisemblable l'argument. Sa forme extrême est que la non-philosophie simule la science—reprenons le terme de Marx, elle « flirte » ou « fait la coquette » avec elle, comme d'aileurs les scientifiques flirtent sans être accusés de mauvaises moeurs avec la philosophie, il est même de bon ton d'être vu en compagnie d'une philosophie. Mais dans l'histoire de la philosophie, il y a beaucoup de flirts avec les sciences et de moins en moins de mariages consommés. Dans la non-philosophie, axiomes, théorèmes, déduction, expérience, modélisation seraient de pures apparences.

L'intution axiomatique

Dans la « première » non-philosophie, celle que l'on dira « cherchée », avant les nouveaux travaux à paraître, cet appareil classique du sérieux scientifique est en effet présent, revendiqué, entouré aussi de beaucoup (pas toujours) de précautions et de modalités du fait même de son mélange ou de ses rapports de proximité avec la philosophie. A condition de lire le programme et surtout les attendus de la non-philosophie….« avec le bon bout de la raison » (Rouletabille), ou de lui donner « un bon sens » (Leibniz), on aurait dû comprendre qu'il ne s'agissait pas d'un nouveau mélange épistémologique. Mais les objecteurs philosophes ont pris la non-philosophie au moment de son invention évidemment trop simple et de son émergence inachevée. Or toutes les données de la solution étaient déjà présentes mais pas organisées. Dans cette première non-philosophie la science était cherchée et prédessinée, non pas comme Un métaphysique ou Un-Tout, mais comme immanence, ce qui s'écrivait Un-en-Un. Les techniques d'écriture suggéraient ce nouveau concept du Réel mais il fallait des pratiques plus solides. L'immanence avait déjà reçu son contenu propre mais c'est maintenant avec les moyens de la quantique qu'il est avéré.

Ce que j'appelle la seconde non-philosophie, comme Science générique, encore à paraître, est l'essai de remplir concrètement cette « visée » de science en prenant pour « modèle » des manières de penser en usage dans la physique quantique, une discipline particulièrement adaptée aux intentions fondamentales d'une non-philosophie par son caractère en lui-même hautement philosophique. Il s'agit donc de l' « accomplir » en achevant autant qu'il est possible de séparer, de redistribuer plutôt, le nouveau dispositif scientifique dit générique et son objet philosophique. Mais nous n'en sommes pas encore là. On se contentera de rappeler les précautions qui entouraient ce motif scientifique et surtout, ici, le motif axiomatique dans les premiers ouvrages et la solution qui s'y esquissait déjà, celle d'une transformation de la notion même d'axiomatique. Elle était dite alors encore « transcendantale », de là une grande source de confusions.


1. Pourquoi une science ? Le cercle vicieux, essence de la philosophie et source de sa suffisance, est l'adversaire à débusquer. Pour sortir de ce cercle ou le repousser le plus loin possible, deux moyens extérieurs l'un à l'autre se présentaient, a) un moyen « ontologique », la distinction du Réel-Un et de l'Être, de l'immanence et de la transcendance, de la Dernière Instance et de ce qu'elle détermine, b) un moyen théorique, l'axiomatique. Le problème a été d'emblée de les combiner dans une science.

2. Une science d'objet - pas une théorie formelle, une ontologie formelle ou même une philosophie (qui n'a pas d'objet sauf celui qu'elle produit) - répond à cette exigence générale qu'une science possède des axiomes mais ne s'y réduit pas. C'est le cadre que doit respecter la non-philosophie. Le problème sera donc celui de la répartition entre le formel et l'objet et se concentrera dans cette distribution qui ne peut qu'être spéciale si l'objet se trouve être la philosophie c'est-à-dire une discipline globalement transcendantale (en de multiples sens et versions). Quelle science pour le transcendantal, un geste qui échappe de toute façon à une science simplement positive ? Mais la solution dans les premiers ouvrages, souvent dite à son tour globalement « transcendantale » faute du bon terme, ré-introduit un cercle vicieux contre lequel nous n'avons cessé de nous battre. De toute façon s'il y a recours à l'objet philosophique pour formuler les axiomes, que ce soit effectivement ou par insuffisance conceptuelle, alors le problème est toujours celui du cercle et d'une herméneutique à limiter.

3. Maintenant comment associer une science selon l'Un (et non évidemment de l'Un sauf s'il s'agit de l'Un métaphysique et compagnon de l'Etre), qui ne peut éviter une certaine dette herméneutique, et une axiomatique, qui semblent s'exclure ? L'Etre tolérerait une axiomatique mathématique mais pas l'Un, surtout s'il est transcendantal, pas la Dernière Instance.

Il est évident, du moins désormais sur la base de la non-philosophie, qu'à nouvel objet nouvelle science, à nouvelle science nouvelle conception de l'axiomatique. Il n'a jamais été question de rabattre simplement l'axiome logico-formel sur le réel-Un. Nous soutenons, sur cette base de la science générique, qui est une science particulière par son objet mais qui fonde une universalité ou des invariances de procédures, qu'il est possible d'enregistrer certaines conditions de l'objet dans l'axiomatique adéquate tout en gardant la nécessité d'un certain vide des déterminations de l'objet nécessaire à l'axiome et en témoignant d'une fidélité déductive et formalisante. On ne comprend rien à la non-philosophie si l'on croit que c'est une nouvelle position philosophique destinée à en remplaçer d'autres, à lutter contre elles et animée d'une pulsion fondatrice ou même simplement « fondamentale » comme les positions de l'idéalisme et du matérialisme. Ni science positive ni science transcendantale, ce genre d'objectifs ne peut plus être le nôtre.


L'Un-en-Un est et a toujours été une immanence radicale, M. Henry en montrait la possibilité, mais elle était restée énigmatique quoique en cours de précision. Ce n'est pas une évidence intellectuelle et ontologico-aristotélicienne, ni une « évidence immédiate » (sauf peut-être dans Philosophie et Non-philosophie, ouvrage ancien et malheureusement toujours cité). Encore la formulation de cette immanence tourne-t-elle sans cesse cette interprétation si on veut bien lire attentivement, sans compter la critique de l' expérience transcendantale comme intériorité, de la conscience husserlienne et même très vite de l'ego transcendantal de M. Henry. Par exemple ce n'est pas un affect, ou alors un affecté-sans-affection, mais elle permet d'interpréter l'affectivité. Depuis lors tout un travail d'écriture sur le signifiant pour dire l'immanence a été entrepris mais désormais jugé insuffisant. Il fallait un modèle scientifique pour relayer la critique et la déconstruction des concepts, ce fut spontanément l'axiomatique, ce sera plus tard, aujourd'hui, le modèle quantique.


Les invariants génériques de l'axiomatique

La nouvelle conception « générique » de l'axiome qui s'esquisse dans la non-philosophie est celle de l'axiome « unilationnel » ou qui apporte soit de l'espacement matériel et de la différence signifiante écrite par le moyen d'une forme et de règles logiques, soit un apport conceptuel mais réduit et hors « suffisance ». Tout axiome, on le suggérera, est unilationnel mais la non-philosophie et surtout la science générique obligent à remarquer ce phénomène et à le spécifier, plus généralement à dégager les invariants génériques qui font un axiome lorsque l'on veut bien ne plus s'obséder du modèle logico-formel. Nous avons droit à cette universalisation de l'axiomatique si elle est réglée, respecte les invariants nécessaires et n'est donc pas un forçage métaphorique. De là une modification de la notion de la structure des axiomes ou de leur forme et partiellement de leur rôle.

Un axiome n'est pas une évidence mais une position libre, sans doute, mais c'est là aussi une doxa trop exclusive tirée d'une pratique logicienne et mathématicienne calculante. Liberté relative seulement, un axiome est un dispositif à plusieurs dimensions, il y a une teneur, un contenu de matrices ou de formes, un alphabet ou un stock de signes, et sa liberté s'exerce dans cette triple limite. La confusion de la teneur et du contenu dans la pratique mécanique de l'écriture empêche d'apercevoir l'extension de l'axiomatique et les limites de sa réquisition exclusive dans un cadre scientifique « rigide ».

1. La teneur de l'axiome est toujours de l'ordre du vide. On distingue la teneur, le contenu et l'apport unilationnel d'un axiome. Même les axiomes formels ont une teneur, c'est soit le vide de l'espacement qui transparaît à travers l'écriture ou la matérialité signifiante, soit comme ici, dans la non-philosophie, l'immanence comme suspens neutralisant de la transcendance philosophique, suspens que viendra confirmer la version « quantique » de la non-philosophie. Cette teneur d'immanence exclut le vide formel et le vide ensembliste, remplacés ici par un suspens neutralisant de la transcendance. Mais on pourrait faire l'hypothèse que le vide formel et le vide ensembliste sont comme une matière d'immanence et de suspens pour l'axiome et où viendrait se loger et se dissimuler la possibilité d'un « sujet » ou du moins d'un vécu.

2. Le contenu est soit celui a priori des matrices d'axiomes ou des formes réglées dans un cadre logico-mathématique, soit dans la non-philosophie la forme également a priori de la « dualité unilatérale » immanente et non plus de la forme logique. Sous cet angle on parlera d'axiomes unilatéraux.

3. Les axiomes ont ou apportent un apport unilationel variable par l'alphabet, x,y,z, p et q. Cet n'est plus seulement a priori comme le contenu mais mixte ou « occasionnal », à la fois immanent au système et appartenant à un méta-langage. Mais dans la non-philosophie il est fourni par les « grandes lettres » des concepts et des textes, et non par les « petites lettres ». C'est aussi dans les deux cas un terrain d'exercice de la liberté, ils sont libres dans les limites de leur teneur, de leur matrice ou forme, enfin dans les limites d'une écriture matérielle-signifiante ou bien conceptuelle-unilatérale. L'axiomatique est comprise trop simplement comme librté quasi métaphysique que l'on oppose à l'axiome transcendantal/immanental qui serait lié, lui, au Réel. L'axiomatique a de sévères contraintes d'environnement à respecter.


La variabilité que l'axiomatique puise herméneutiquement dans le contenu unilationnel se répercute aussi dans la formulation même de sa forme, soit du méta-langage dans le langage-objet s'il s'agit de l'axiome traditionnel, soit du stock occasionnal de concepts dans la dualité unilatérale qui peut donc se dire de manière variable selon les vocabulaires de la philosophie, mais toujours dans le respect pratique et le travail de sa forme-axiome invariante et réglée cette fois non par les systèmes formels mais par la dualité unilatérale.

Par rapport aux axiomes logiques ou mathématiques qui supposent un vide matériel indépendant, dont la calcul mécanique fait usage mais aussi abstraction, il est sûr que les axiomes non-philosophiques, « unilationnels » au sens paradigmatique étroit ou générique et qui font usage d'une immanence radicale, manifestent explicitement ces invariants que dissimule le calcul. Husserl et la phénoménologie sous modification non-philosophique ou générique sont ici directeurs. Ce sont en particulier des prestations axiomatiques vécues de la science comme nouveau « sujet » générique, non de la conscience transcendantale comme chez Husserl. Vouloir appliquer l'axiomatique resteinte logiquement à la philosophie aurait été une tentative dérisoire, on le savait sans les objections précipitées. En revanche il est possible maintenant de parler ouvertement d' « axiomes vécus » et de « théorèmes humains » comme nous le faisions autrefois.


La complémentarité unilatérale de l'axiomatique et de l'herméneutique


Le dernier point évoqué sur la fonction occasionnale et herméneutique de la philosophie pose le grand problème d'une axiomatique dite « réelle » sans être transcendantale ni positive (logique ou mathématique), axiomatique de l'Un-en-Un plutôt que de l'Etre. Le posé ou le Réel est indifférent à la position, l'immanence à l'acte de la poser—est-ce une sorte de retour du dogmatisme? Partiellement, l'Un-en-Un est posé mais par un acte lui-même déterminé en-dernière-instance par ce qu'il pose, les actes de position sont des apparences objectives (ou macroscopiques dans une quantique de la philosophie), il y a du posé-sans-position mais ce posé détermine-en-dernière-instance les actes de sa position. C'est le langage qui exerce la contrainte occasionnale de son ontologie spontanée et qui oblige à s'exprimer ainsi. Alors comment résoudre ce problème d'une condition herméneutique d'une axiomatique opérante sur le matériau indocile de la philosophie ?

La solution est de poser d'entrée de jeu une Dernière Instance comme immanence déjà subjective ou capturant quelque chose de la philosophie, du vécu, et donc la réduisant déjà. Cela était-il prédessiné dans les premiers textes ? Pas affirmé comme principe de la solution mais tous les éléments y étaient, sous la forme d'une immanence dite encore sans doute à tort « transcendantale », mais qui était bien un vécu abstrait, un vécu-sans-vie, et qui faisait suture spéciale, non-ontologique, du Réel avec le Logos du coup réduit à un état d'immanence. Cette solution est restée souvent incomprise malgré les notions de forclusion et d'unilatéralité. Maintenant nous concentrons la possibilité de la non-philosophie ou de la science générique de la philosophie dans la formule de l'unité de la science et du sujet sous la science. C'est poser l'unilation de l'herméneutique par l'immanence axiomatique et, de l'autre côté, la relation unilatéralement et non bilatéralement nécessaire de l'herméneutique à l'axiomatique. Cette relation asymétrique est, quantiquement, celle d'une complémentarité unilatérale destinée à remplacer celle, trop dialectique, de Bohr.

Les axiomes-flux et la défense a priori

La non-philosophie reconnaîtra désormais que les axiomes passent par toutes les phases que décrit la science générique, ce qui explique beaucoup des traits phénoménologiques de l'axiomatique que la logique et la mathématique sont trop courtes pour expliquer ou dont elles donnent une version « aplatie » et positive. 1. L'axiome émerge à l'état de vecteur mais vécu, de fusion de la science et du sujet, il constitue de cette manière le fonds immanent dit « oraculaire » non pas du vide mais du neutre. On dira que le vecteur sous-vient, plutôt que d'être un objet ou une différence, de l'écriture signifiante et spatialisée, c'est un axiome-flux, l'axiome est lui aussi un vecteur plutôt qu'une multiplicité signifiante-langagière. C'en est fini de sa limitation à la conception logique-langagière et/ou onto-logique, c'est un processus immanental plutôt que transcendantal, qui procède par phases et non par différence multiple, 2. Ce vecteur a la forme interne de la dualité unilatérale. 3. Celle-ci se manifeste par un état particulaire ou unifacial, noématique c'est-à-dire immanent et transcendant-en-immanence. C'est le moment où l'axiome sous-vient comme Etranger—que serait un axiome qui n'introduirait pas une nouveauté irréductible au savoir donné, qui ne se présenterait pas de front ou unifacialement ? Les axiomes ne sont pas tournables ou contournables, enfin ils ont un aspect de particule de vérité ou de savoir qui est resté inexpliqué. L'axiome est un « coup de force », on ne peut commencer qu'ainsi pour la pensée du moins. C'est une manière de « forcer » la pensée, pas un forçage hyperbolique par l'altérité ou le forcing mais un forçage que l'on appellera par ailleurs également « messianique ».

Toutefois cet aspect offensif de l'axiome doit être bien compris, c'est plutôt un reste devenu immanent, un souvenir transformé de la manière dont il a été traditionnement compris jusqu'à Gödel. C'était une arme de conquête de la pensée, une manière rusée de capturer du savoir ou de la vérité, et de la nature d'un coup, le coup axiomatique pour maîtriser de l'infini par une procédure finie. Toutefois l'axiome s'était déjà manifesté moins dans le combat que dans la préparation au combat logique et mathématique, la mise-en-axiomes était comme la préparation de l'expérience de mesure en mécanique quantique. Nous enregistrons le changement de destination de l'axiome qu'implique son universalisation générique. Son usage ou son caractère « offensif » est une apparence objective. S'il est reconnu d'ailleurs de manière excessive elle aussi comme une manière d'habiller et de toiletter le savoir, il est pertinent en réalité pour une défense a priori contre les errances et les objections, défense a priori aussi et particulièrement dans la non-philosophie où, sous réserve de sa transformation, il défend le caractère générique du Réel contre l'entreprise de la philosophie. Il est temps de secondariser, après son rôle ancien de conquête, son rôle policier de la période intermédiaire maintenant que c'est l'analyse logique qui remplit cette fonction. Ce n'est pas une arme de combat en général, une police apriori ou souvent a posteriori, mais plutôt une défense a priori qui coïncide avec l'émergence de la vérité comme subjective. Mais malgré son milieu générique singulier de naissance, il fait comprendre qu'à cause du rôle herméneutique secondaire de la philosophie, l'axiomatique doit être relativement dépendante du type de la science, de l'algèbre dans la science générique ou bien d'une ontologie formelle dans la mathématique ensembliste.

Les oraxiomes

Un dernier pas peut être esquissé et l'a été depuis longtemps. L'axiome générique est une forme alogique ou plutôt non-logique, une dualité unilatérale mais, nous l'avons déjà suggéré, celle-ci est vécue ou son immanence remplie d'une matière pure de vécu. Le vécu des prestations axiomatiques est évidemment sans sujet ni ego, cette structure est générique, ni individuelle ni collective, sans conscience ni être. Il y a bien un Réel, un posé-sans-position donc un non-posé, mais il n'existe pas ou n'est pas quoique efficace et agissant par son non-agir sur et dans la pensée comme philosophie. L'agir du vecteur vécu est aussi un non-agir mais qui ne peut se comprendre que comme de-dernière-instance, il y a une stérilité de l'axiome, plutôt une neutralité dans la non-philosophie qu'un vide combinatoire symbolisé spatialement ou de manière finitaire. Un axiome qui est un agir-sans-agir, un vécu-sans-sujet ou sans forme de sujet, ne peut être, pour maintenir le régistre langagier, qu'un « oraxiome », l'axiome réel sans pourquoi ou comme « oracle » de l'immanence vécue. Combiner dans un concept-valise l'axiome et l'oracle apparaîtra comme la dernière provocation d'une dérive qui touche à son terme. Mais l'oracle comme décision arbitraire de type philosophique sous détermination algébrique, donc moins arbitraire de toute façon que la décision philosophique elle-même soumise à uneforme scientifique, est un dernier hommage rendu à la décision philosophique, à Delphes, par une axiomatique qui est notre conception de la liberté de position inventive dans le langage et la philosophie. Tout le discours de la non-philosophie est un éloge non pas du vide de déterminations philosophiques mais de leur traitement sous vide, et ce vide lui aussi parle et pense.