Le Conseil de dernière instance et l'autorité de la suffisance politique
25/06/2003, Erik Del Bufalo
Le choix théorique ouvert par l’axiome non-philosophique de détermination en dernière-instance est une réponse tantôt radicale tantôt rigoureuse à tout type d’autorité. Cette réponse est de l’ordre de l’existence, dont l’essence est la non-dualité de la forme et de la matérialité ; elle réfute tout type de suffisance politico-philosophique. De là vient que l’ONPhI se donne un Conseil de Dernière Instance comme garantie de sa non-suffisance et, donc, de sa non-autorité. Le but essentiel de ce conseil est d’éviter toute forme d’arbitraire, d’abus et d’autoritarisme dans les décisions de l’ONPhI. Celles-là se prennent désormais, moyennant le Conseil DDI, sans auto-position et sans auto-donation. Ainsi est-il incarné, en chair et en os, par trois personnes, car il n’est pas un conseil institutionnel mais un conseil en-personne dont la responsabilité n’est pas mondaine ou philosophique mais insuffisante par rapport au monde ou à la philosophie ; ce qui ne veut pas dire une manque de responsabilité ce serait encore une façon de réduire la capacité de répondre (responsabilité) à un sujet-suffisamment-irresponsable, voire à un sujet d’une irresponsabilité auto-suffisante.
Pourquoi est-il composé de trois membres ? Il assume la forme généralisée de la Décision philosophique, c’est-à-dire celle d’une Dyade (ou opposition) et de l’Un (censé agir comme synthèse par unité ou par différence). Mais il assume cette forme en la « dualysant ,» en prélevant l’autorité politico-philosophique du Monde. Le nombre de trois doit se lire comme Deux-moins-Un. Cette opération de réduction est l’objectif même du Conseil DDI. Le membre tiers l’Identité de chaque membre est le prélèvement ou la soustraction de la suffisance de l’accord, de la communication ou de la simple discussion. Le Conseil DDI est en conséquence un moyen et pas nécessairement le seul d’éviter le tiers exclu du Principe de Philosophie Suffisante propre à la Décision philosophique, lequel est l’essence ou l’auto-référence infinie du pouvoir, sa condition de possibilité illimitée.
L’élection des membres qui le constituent ne se fait pas, par conséquent, par le biais du libéralisme, selon les règles de quelque régime constitutionnel, voire « représentatif ,». Les membres du Conseil DDI ne représentent pas les membres de l’ONPhI. Qui plus est, ils ne représentent personne ni aucune idée. Ils sont en charge de la « morale ,» et non du gouvernement dans la lutte de l’ONPhI contre la mondanisation de la non-philosophie, voire contre la résistance philosophique aux actes de la non-philosophie. L’élection des membres du Conseil DDI se fait, ainsi, en fonction des axiomes fondamentaux de la non-philosophie, en tant qu’ils sont des axiomes-vécus. Autrement dit, les membres du Conseil DDI ne sont ni nécessaires ni contingents ni arbitraires, et par conséquent ni interchangeables ni paradigmatiques. Ils sont là seulement grâce à une élection non-auto-positionelle d’une méthode sans modèles. La légitimité du Conseil DDI ne dérive donc pas de la représentation (impossible) des hommes réels mais de l’unilatéralité du Réel par rapport à ses représentations ; ses membres sont là en tant qu’univers, univers d’hommes en-personne. Le Conseil DDI est le résultat, plutôt que l’agent, d’une démocratie universelle, d’une démocratie matérielle, voire unilatérale, donnée sans (auto)donation, posée sans (auto)position dès que l’Un est forclos performativement ou axiomatiquement à l’amphibologie de la représentativité.
Les membres du Conseil n’agissent pas en fonction de leur volonté, de leur conception des choses ou de leur psychologie :ils donnent à l’éthique non-philosophique de l’ONPhI son efficace en tant, justement, qu’ils sont dépourvus de toute autorité en général ; c’est la seule condition de leur permanence au sein du Conseil DDI, dont le juge n’est que la dernière-instance elle-même.