RE: TR 2004/05 : Est-ce que le temps passe ?

Vous me répondez que la question de savoir si le temps passe n’a pas de sens pour un non-philosophe. J’entends bien et en prends note.
Cela dit, je retiens votre dernière phrase. Comprenez bien que je ne suis pas en train de distribuer des bons points de sagesse ! Et quand je parle de pensée délirante, j’entends par là une pensée qui ne contrôle plus ce qu’elle pense au sens où elle est incapable d’objectiver sa pensée, et donc de la situer… dans le temps - que cette incapacité résulte d’une altération mentale, de la prise d’alcool ou autre ou, pourquoi pas, d’une pratique de pensée : une pensée devenue croyante, « convertie », une pensée en général débarrassée de tout sens critique. Quand vous me dites que « le temps est une notion étrangère à la pratique non-philosophique », je suis donc forcé d’en conclure que cette pratique est délirante. Je ne porte là aucun jugement de valeur morale en disant cela. Je ne dis pas que c’est bien ou mal de penser comme cela.
De même que l’entreprise socratique, ne l’oublions pas, était une entreprise de « conversion » de la pensée, le but de la pratique philosophique consistant à faire croire à la possibilité d’un retour à une existence antérieure idéale (« pensée d’un réel halluciné ») : une entreprise de conversion, une pratique « religieuse » au sens où l’esprit adhère tellement à ce qu’il comprend qu’il n’en est plus séparable. C'est penser " hors du temps ".
Arrivé là, il faut tout de même s’interroger sur le pourquoi de cette entreprise socratique, philosophique, de cette pratique « hallucinatoire » de la pensée, de même que je m’interroge sur le pourquoi de l’entreprise non-philosophique ?
La première visait à guérir l’homme, en premier lieu Socrate, de sa mélancolie. C’était un moyen pour lui de vivre mieux, de surmonter cette mélancolie. De là aussi cette expression courante : de quelqu’un qui se plaint tout le temps, on dit qu’il manque de « philosophie ». La sagesse de la philosophie socratique résidait donc dans son pouvoir « tonifiant ». La sagesse ainsi entendue définit une pensée qui aide l’homme à mieux vivre une vie qu’il vit naturellement dans la déception : Il est sage de se montrer philosophe dans sa vie si on souffre de mélancolie, si on est déçu dans sa vie, par sa vie et si toutefois on n’est pas masochiste !
La pensée aléatoire interroge simplement cette sagesse classique pour le compte d’esprits mélancoliques qui ne parviennent cependant pas à croire à un possible au-delà métaphysique. De tels esprits « forts » ne voient pas en quoi la philosophie leur serait sagesse puisqu’elle n’exerce aucun effet tonifiant sur leur esprit. Elle explore donc une autre voie de « salut » qui ne serait pas de nature hallucinogène, religieuse, « gnostique », qui ne signerait pas nécessairement une abdication de la pensée critique. C’est en cela que je la vois « non-philosophique » dans son contenu recherché par rapport à la philosophie classique, bien que je la considère classiquement « philosophique » par rapport au but qu’elle se fixe !
Pour conclure, je vous pose la question : la pratique non-philosophique est-elle sage ? Et si oui, en quel sens ? Et si non, pourquoi ?
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